S'ENNUYER PEUT AVOIR DES BéNéFICES (MêME ADULTE)

L'ennui est aujourd'hui un espace à combler coûte que coûte. Tâche facile, compte tenu du divertissement infini qu'offrent nos smartphones et autres appareils connectés. Une expérience menée en 2014 prouve que notre intolérance à l'ennui nous amène même à préférer nous infliger des électrochocs, plutôt que de rester assis à ne rien faire. Mais est-ce si terrible que ça de s'ennuyer? Le magazine américain Discover fait l'état des principales conclusions de la science.

Chez les scientifiques aussi, l'ennui ressort à première vue comme un phénomène nocif. Dans leur littérature, on constate d'ailleurs que la distinction entre l'extrême ennui et la dépression clinique n'est pas toujours claire. Cela, aussi, parce que la définition du phénomène reste approximative.

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Pour certains, l'ennui est l'expérience «négative de vouloir, mais de ne pas pouvoir s'engager dans une activité satisfaisante». Pour d'autres, certaines activités nous ennuient parce qu'elles ne seraient pas stimulantes, trop faciles, ou à l'inverse, trop difficiles (étudier pour un examen, par exemple).

Finalement, l'ennui reste difficile à étudier, car il diffère au cas par cas. Dans un article publié en 2013 dans la revue Behavioral Sciences, les psychologues Shane Bench et Heather Lench expliquaient, par exemple, que lire un livre à son enfant peut être très ennuyant, comme très intéressant pour un parent. De la même façon, selon la personne, ce temps à ne rien faire peut avoir de bons côtés.

S'ennuyer, c'est risqué

Dans leurs travaux, les psychologues Shane Bench et Heather Lench ont trouvé à l'ennui une fonction dans l'évolution de l'espèce humaine. En outre, la sensation désagréable provoquée par l'ennui amène les individus à poursuivre des activités différentes, potentiellement plus gratifiantes. De plus, l'ennui augmenterait l'opportunité et l'envie d'une prise de risque.

«Si une rivière hostile n'a jamais été traversée en raison de son danger, il n'y a aucun moyen de savoir quelles ressources sont disponibles de l'autre côté», écrivent ainsi Shane Bench et Heather Lench. Aussi, le comportement audacieux et casse-cou de quelques individus désabusés dans leur tâche initiale pourrait bien avoir joué un rôle dans la survie de notre espèce.

D'autres études ont quant à elles établi un lien entre la propension à l'ennui et d'autres comportements à risque, plus dangereux. En l'occurrence, les jeux d'argent ou la toxicomanie promettent la fin du languissement, grâce à des récompenses ou des sensations fortes, mais mettent aussi en péril la situation (et la vie) du consommateur.

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D'autres recherches vont plus loin, en suggérant qu'une société en perte de sens est plus à même de développer des relations hostiles entre ses différents groupes sociaux, est de déformer sa mémoire collective.

Pour se prémunir de certains effets désastreux d'un après-midi à ne rien faire, il vaut mieux comprendre d'abord comment fonctionne cet ennui. Si vous vous morfondez sur une activité peu intéressante, la psychologue Sandi Mann, dans son livre The Science of Boredom («La Science de l'ennui»), conseille d'écouter de la musique, ou de gribouiller en même temps que vous écoutez. Ces deux activités annexes permettent de stimuler le cerveau, sans le distraire de ses tâches principales. De la même manière, Albert Einstein aurait eu pour habitude de réfléchir à ses problèmes de physique tout en jouant du violon...

Si vous êtes immobilisé(e) par la paresse, ne culpabilisez pas: parfois, le moyen le plus efficace de lutter contre l'ennui, c'est tout simplement de l'accepter. Loin d'être improductif, il nourrit la rêverie ou le vagabondage, stimule la créativité et la résolution de problèmes... Comme une séance de sport, vous ne le constaterez qu'a posteriori!

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